Il ne devrait pas y avoir de big bang des lois de bioéthique. La ministre de la santé Roselyne Bachelot a tracé, mardi 23 juin, le cadre de la révision de la législation, qui devrait intervenir courant 2010. S'exprimant en clôture des états généraux de la bioéthique, Mme Bachelot a estimé que "l'architecture globale" des lois "ne saurait être bouleversée".
LE MONDE | 24.06.09 | 14h15 • Mis à jour le 24.06.09
Panorama Bioéthique : six questions de société
Les Etats généraux de la bioéthique se clôturent à Strasbourg avec le forum citoyen consacré au don d'organe, alors que la loi sur la bioéthique de 2004 doit être révisée. Vous avez été le bénéficiaire d'un don d'organe, racontez-nous votre expérience. Vous avez refusé que l'on prélève un organe sur un proche décédé alors qu'il avait donné son accord, faites-nous part de votre point de vue. Une sélection de vos témoignages sera publiée sur Le Monde.fr.
Ecartant, notamment, toute légalisation des mères porteuses, Mme Bachelot a dessiné le cadre d'une révision a minima des lois de 1994 et 2004. "Des évolutions peuvent toutefois être envisagées", a concédé la ministre, qui se prononce pour la "levée encadrée" de l'anonymat du don de gamètes (sperme et ovocytes).
Enjeu le plus polémique de la révision, la légalisation des mères porteuses, interdite par la loi depuis 1994, a fait l'objet de vifs débats. Pendant plusieurs mois, partisans et détracteurs de la gestation pour autrui (GPA) se sont affrontés, les premiers pour défendre le droit des femmes privées d'utérus à avoir un enfant, les seconds pour stigmatiser une pratique contraire à la dignité des femmes porteuses. Mme Bachelot a clairement donné raison à ces derniers : selon elle, "le respect des principes de non-marchandisation et de protection des plus vulnérables apparaît comme strictement incompatible avec toute libéralisation" de la GPA.
La ministre de la santé jouait sur du velours : l'un des trois jurys citoyens constitués dans le cadre des états généraux a condamné à l'unanimité le recours aux mères porteuses. Appelé à réfléchir aux contours d'une mise en place de l'assistance médicale à la procréation (fécondation in vitro, insémination artificielle), ce jury s'est par ailleurs prononcé contre une extension de l'aide à la procréation aux femmes célibataires et aux couples d'homosexuelles. "Les citoyens ont souhaité que l'aide à la procréation reste une réponse médicale à un problème médical d'infertilité", a précisé Jean Léonetti, député (UMP) et président du comité de pilotage, en levant le voile sur un avis qui ne sera rendu public que dans quelques jours.
Si son cadre reste inchangé - l'assistance médicale à la procréation (AMP) serait toujours réservée aux seuls couples hétérosexuels infertiles -, les conditions de remboursement par l'assurance-maladie pourraient évoluer : Mme Bachelot s'est prononcée pour un recul de l'âge des femmes (42 ans aujourd'hui) ouvrant le droit au remboursement. La ministre s'est également déclarée favorable à "la levée encadrée" de l'anonymat des donneurs de sperme et d'ovocytes. Sur ce point, elle rejoint le Conseil d'Etat, qui avait estimé, le 6 mai, que le principe de l'anonymat du don de gamètes "comporte à long terme des effets préjudiciables à l'enfant (issu de ce don), essentiellement parce que ce dernier est privé d'une dimension de son histoire".
En revanche, Mme Bachelot ne s'est pas prononcée sur la question de la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Mais la France pourrait se diriger vers un régime d'autorisation très encadré, comme l'a préconisé le Conseil d'Etat et comme le suggère l'un des jurys citoyens. L'ensemble de la réforme ne sera de toute façon dévoilé que début 2010. Ce devrait être la dernière révision globale des lois de bioéthique. Mme Bachelot a en effet indiqué que la législation "ne sera plus examinée à date fixe, tous les cinq ans, mais à la demande, selon des modalités innovantes qu'il reste à définir".
Cécile Prieur
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