viernes, 5 de junio de 2009

L'Europe et la bioéthique


A la veille de la révision des lois bioéthiques en France, Elizabeth Montfort apporte son éclairage sur les orientations européennes en bioéthique à travers la Convention d'Oviedo signée en 1997. Une convention qui devrait donner aux différents protagonistes, dans le débat actuel, un référentiel commun, point de départ de la réflexion.

Depuis 40 ans, l’Europe s’intéresse à l’impact des recherches scientifiques sur la dignité de l’être humain.

La Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine, dite Convention d’Oviedo porte sur la protection des Droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine. Depuis les années 70, L’Europe (1) s’intéresse à l’impact des recherches scientifiques sur la dignité de l’être humain et de ses droits, jusqu’à signer cette convention en 1997. Elle est le premier instrument juridique international contraignant qui protège la dignité, les droits et les libertés de l'être humain contre toute application abusive des progrès biologiques et médicaux. Ce traité part de l'idée que l'intérêt de l'être humain doit prévaloir sur l'intérêt de la science ou de la société .

Le but de cette Convention est de servir de base commune à tous les Etats membres et de combler un vide juridique dans les pays ne disposant pas de réglementation nationale. D’où la difficulté de rédiger un document qui devait faire l’objet du plus large consensus de la part de pays si divers.

Cette Convention, adoptée le 4 avril 1997 est entrée en vigueur dans les13 Etats qui l’ont aujourd’hui signée puis ratifiée. La France est uniquement signataire mais s'efforce néanmoins de tenir compte de ses dispositions. La Convention est complétée par trois protocoles relatifs au clonage, à la recherche biomédicale et à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine.

Quels sont les aspects scientifiques de la Convention d’Oviedo?

Plusieurs articles concernent le génome humain (article 11 à 14). L’examen des gènes ne peut être pratiqué que dans deux domaines : la médecine et la recherche médicale, dans des domaines précis. La Convention rappelle le principe de non discrimination de toute personne en raison de son patrimoine génétique (art. 11).

L’article 12 a pour objet le diagnostic: il interdit l'utilisation de tests génétiques à des finalités non médicales mais ne fixe pas de règle relative à l'accès des tiers aux résultats de ces tests, ni à leur utilisation. L’article 13 interdit toute intervention abusive sur le génome: il ne peut constituer un matériel de recherche et sa modification est interdite sur les cellules germinales.

La Convention interdit la réalisation de tests prédictifs à des fins économiques ou sociales, (l’emploi et l’assurance), ainsi que pour sélectionner le sexe d’un enfant à naître (art. 14). Elle proclame la liberté de la recherche.

Les articles 16 à 18 précisent l’articulation entre liberté de recherche et protection de l’être humain. L’homme peut être sujet de recherche s’il lui est proposé un traitement. Cela signifie que les risques ne peuvent être disproportionnés par rapport aux résultats souhaités et qu’un consentement libre et éclairé doit être apporté. L’article 18 concerne la recherche sur l’embryon qui, s’il n’est pas défini, fait l’objet de protection: lorsque la recherche sur l'embryon est admise par la loi, celle-ci doit assurer une protection adéquate de l'embryon, sans qu’elle ne précise en quoi consiste « la protection adéquate ».

Elle interdit formellement toute constitution d’embryons à des fins de recherche, reconnaissant explicitement que l’Assistance Médicale à la Procréation n’a qu’un seul but : la procréation.

Dans le contexte du prélèvement d'organe à partir de donneur vivant, la Convention insiste sur le principe du libre consentement ; ce prélèvement n'a lieu que si il n'y a aucune possibilité d’obtenir un organe sur un cadavre. Les articles 21 et 22 précisent que « le corps humain et ses parties ne doivent pas être source de profit »

La Convention d’Oviedo est d’une importance capitale.

C'est le seul texte contraignant supranational qui existe en matière de bioéthique. Ce texte européen constitue le pilier principal complété par les protocoles additionnels, en particulier celui qui interdit tout clonage humain. Même si la Convention n’est applicable qu’aux pays qui l’ont ratifié, elle reste, cependant, un texte de référence puisque tous les Etats membres du Conseil de l’Europe l’ont signé.

Juridiquement, la Convention est un texte contraignant qui n’est ni une déclaration, ni une résolution. La protection juridique en matière de biomédecine concerne le consentement de celui qui fait l’objet d’un traitement ou d’un don d’organe. L’information doit être donnée sur la nature de l’intervention, ses conséquences et ses risques pour permettre un consentement libre et éclairé direct ou par l’intermédiaire d’une autorité de tutelle en cas d’incapacité. La Convention stipule que tout patient a le droit de connaître toute information recueillie sur sa santé, notamment les résultats des tests génétiques prédictifs et reconnaît aussi que la volonté d'une personne de ne pas être informée doit être respectée.

La valeur suprême de ce texte est la dignité

Bien que le mot éthique ne figure pas dans le titre, mais seulement dans l’article 28 de la Convention, il s’agit bien d’éthique Le préambule en rappelle l’enjeu : « Conscient des rapides développements de la biologie et de la médecine ; conscients des actes qui pourraient mettre en danger la dignité humaine par un usage impropre de la biologie et de la médecine ; affirmant que les progrès de la biologie et de la médecine doivent être utilisés pour le bénéfice des générations présentes et futures ». La valeur suprême de ce texte est la dignité qui inclut l’intégrité, l’identité et la non patrimonialité de l’être humain et marque le souci de sa protection (art. 1). Conscient de l’intérêt de l’être humain et de la liberté de la science, la Convention n’hésite pas à affirmer qu’en cas de conflit, c’est l’être humain qui doit l’emporter : « L'intérêt et le bien de l'être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science » (art. 2)

A la veille de la révision des lois bioéthiques dans notre pays, cette Convention devrait donner à tous les protagonistes un référentiel commun, point de départ de la reflexion.

Elizabeth Montfort, ancien député européen, est présidente de l’Alliance pour un Nouveau Féminisme

(1) Le Conseil de l’Europe, créé après la seconde guerre mondiale regroupe 47 Etats membres. Sa mission est de définir et de faire respecter les droits de l’homme dans ces états, notamment dans les domaines où ils pourraient être remis en cause en raison de circonstances nouvelles, comme la recherche biotechnologique ou les sciences du vivant.

http://www.bioethique.catholique.fr/

Par Elisabeth Montfort le jeudi 28 mai 2009,